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Témoignage #96

En novembre 2022, de petits nuages lumineux, fugaces, étaient apparus depuis quelques semaines dans mon champ de vision. Aucune gêne visuelle, aucune douleur. J’ai tout de même interrogé internet : grâce aux publications de la Professeure Cassoux, j'ai  tout de suite compris l'enjeu. Je voulais tout savoir des différents scenari d'évolution possible du mélanome uvéal. Comme je pense depuis toujours que la vie peut s'arrêter à tout moment, je me suis dit que là, ce pouvait bien être mon tour.  


Mon ophtalmo, contactée, a tout de suite réagi : fond d'oeil dès le lendemain, puis demande d'angiographie en urgence faite à Curie, obtenue 1 mois plus tard. L'angiographie a permis d'identifier encore plus clairement mon mélanome (son stade et ses petites dimensions) et de permettre à l'Institut Curie de décider puis d'enclencher la curiethérapie, réalisée 1 mois plus tard. Dans l'intervalle de 2 mois (entre mon signalement initial et la décision de faire une curiethérapie), j'avais néanmoins eu le temps de me préparer au scenario de l'énucléation, de me préparer aussi au scenario potentiellement fatal (celui de l'évolution métastatique) et de faire mon grand bilan existentiel : je voulais regarder la réalité face. Je l'ai fait, seule, comme mon devoir de m'approprier cette perspective avant de la partager avec mes enfants et mon compagnon. C'était important de leur en parler "en tenant debout" et non effondrée.  


Je n’ai pas eu le choix du lieu d'examen ni du lieu de traitement, et ne l'ai pas demandé. Pour moi, le choix de la curiethérapie signifiait que je garderai mon oeil et puis j'étais prise en charge, j'allais bénéficier des compétences humaines et des technologies les plus pointues, alors quelle chance ! Même sans garantie de guérison, même sans garantie de non-récidive.   


Depuis un an et demi, les bilans font état d’une régression continue de mon mélanome. 


Par la suite, le département Génétique de l'institut Curie a identifié une mutation (un variant pathogène) du gène MBD4 qui prédispose au mélanome uvéal et à un autre cancer. Le risque de transmission est très faible mais dès qu'il diffère de zéro, je me dois d'informer mes enfants mais aussi oncles, tantes et cousins afin qu'ils fassent le test et, dans tous les cas, les fonds d'oeil réguliers de prévention. Ce n'est pas simple d'évoquer auprès d'eux la prédisposition au mélanome uvéal, ainsi qu'aux cancers coliques et aux polypes, et enfin les cas familiaux auxquels je n'ai pas tout compris. Nous sommes peu nombreux à être concernés, partager nos connaissances à ce sujet me serait bien utile.  


Je remercie infiniment mon ophtalmologue d'avoir saisi l'enjeu immédiatement, d'avoir organisé les 1ers examens ici à Angers en urgence, et d'avoir établi une relation efficace avec l'Institut Curie - l'enchainement rapide des étapes a été remarquable - mais tous ses confrères sont-ils aussi aguerris et réactifs en présence des symptomes ? Je milite auprès de mon entourage pour que les gens exigent des fonds d'oeil réguliers de prévention. 


Je dit merci à la Professeure Cassoux et aux membres de son équipe qui se sont engagés dans l'oncologie, spécialité réputée peu attractive à l'université. Je dis enfin merci au système de santé français qui m'a permis de bénéficier d'une thérapie très coûteuse, pour laquelle je n'ai rien déboursé. 

Enfin je vous remercie, Madame Dellis. J’ai découvert l'existence de votre association à la journée du mélanome uvéal à Paris à Curie fin 2023, que j'ai appréciée dans l'ensemble ; j'y ai pris la mesure du travail des chercheurs pour qui j'ai beaucoup de gratitude, et j'ai eu de précieux échanges avec d'autres patient-e-s. Un grand merci pour votre action, pour votre réflexion et pour vos éclairages, Madame Dellis. Vous êtes mon unique soutien de type associatif, grâce à vous une autre patiente m'a contactée et nous allons nous rencontrer. 


P.H.

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